Vous l’attendiez avec impatience! Voici (enfin!!) la sixième revue de l’année 2021 Scorpion Masqué, en mots, en impressions et en chiffres!
La revue de l’année?
Pour les nouveaux, je m’appelle Christian Lemay, j’ai fondé le Scorpion Masqué en 2006. Chaque année depuis 2016, je résume les 12 derniers mois de notre activité et je livre mes impressions sur le marché du jeu, son évolution. En plus de donner des détails financiers croustillants.
Scorpion Masqué est un éditeur de jeux de société. Notre métier consiste à...
Notre structure a grandement été bouleversée cette année. Alors que nous étions une toute petite entreprise de 6 personnes à temps plein, nous avons fusionné avec le groupe Randolph, qui compte plus de 300 employés si on compte tous les pubs franchisés! Traditionnellement, il y avait Christian Lemay (moi-même), président-fondateur et Grand Boubou; Manuel Sanchez, directeur créatif et chargé de projets; Hélène Vigneault, aux événements, au marketing et à la logistique; Carl Brière, directeur des ventes; Sébastien Bizos, graphiste et motion designer; Matthew Legault, aux communications, à la traduction et à l’organisation de playtests.
Les choses ont changé
Il faut savoir que le 1er janvier dernier, le groupe Hachette (troisième groupe d’édition de livres en importance sur la planète!) a acheté l’entièreté des actions du Scorpion Masqué. Dans les mois qui ont suivi, Hachette a échangé une part minoritaire des actions du Scorpion Masqué contre une part minoritaire des actions du groupe Randolph. Amis d’Europe, sachez que Randolph compte 7 pubs ludiques dans la province (et compte en ouvrir d’autres), a une boutique en brique à Montréal et possède son propre réseau de distribution, en plus d’éditer des jeux, dont L’osti d’jeu (notre Cards Against Humanity ou votre Blanc-manger Coco) et Jokes de Papa.
Ces mouvements d’actifs impliquent donc que je ne suis plus le patron ou le Grand Boubou du Scorpion Masqué, des rênes que je suis bien heureux de passer, et que nous sommes maintenant “frères” avec Randolph, un groupe qui a toute mon admiration. Depuis 2012, Randolph a su “rendre cool” le jeu de société au Québec en plus de se faire un nom un peu partout! Je me concentre désormais sur la sélection de jeux (j’ai trouvé de telles pépites cette année!), leur développement, et je participe à l’effort marketing. Je reste la meilleure personne pour présenter les jeux... Et il m’arrive de mettre le nez dans certaines décisions stratégiques. Parce qu’on me le demande et parce que c’est quand même difficile de tout laisser aller d’un coup!
Autre conséquence: Randolph et Scorpion Masqué ont tous deux déménagé dans de nouveaux bureaux que nous partageons. Bien évidemment, Hachette a souhaité que notre distribution québécoise et canadienne passe aux mains de Randolph. Le 1er septembre dernier, nous avons donc mis un terme à une relation de travail de 11 ans avec ILO 307, que je remercie du fond du cœur pour ces belles années. Même chose pour la France, où nous avons dû mettre fin à notre relation avec Asmodee pour passer chez Blackrock, où je retrouverai mon cher ami Yoann Laurent, président, avec qui j’avais édité le jeu Kairn en 2011! Je salue au passage toute l’équipe d’Asmodee, notamment José Chavez et Christophe Arnoud, qui nous avaient aidés à gravir de nouveaux échelons depuis notre arrivée en 2018. Décidément, on pourra se moquer de Scorpion Masqué, dire que c’est la “guidoune” des éditeurs: nous en serons à notre quatrième distributeur sur le territoire français! Amis d’Europe, je vous laisse déduire le sens de “guidoune”.
Aujourd’hui , je crois qu’il n’y a que Sébastien, dans l’équipe d’origine du Scorpion Masqué, qui a vu son poste rester sensiblement le même ... Quoique non, il vient d’être nommé directeur artistique et il s’occupe maintenant de nos devis auprès des fabricants! Manuel est devenu le chef de l’équipe graphique de l’équipe Scorpion-Randolph, en plus d’hériter du poste de chef de studio au sein d’Hachette ... Hélène a dû laisser tomber le marketing et les événements, car elle gère toute la logistique d’importation et de transport de Scorpion, bientôt de celle de Randolph, en plus de nos productions! Elle a de la broue dans le toupet! Faut-il vous rappeler que nous vivons une année catastrophique en matière de transport maritime? Si oui, lisez l’excellent résumé de Carl sur notre blogue, ici: https://www.scorpionmasque.com/fr/blog/o%C3%B9-sont-mes-jeux-la-crise-du-transport. Parlant de Carl, précisons qu’il gère toujours nos ventes, mais en tant que fournisseur de services externe depuis sa compagnie Synapse. De son côté, Matthew a d’abord joint l’équipe marketing, mais depuis le 1er janvier dernier, il s’est rapproché du travail éditorial en concentrant ses activités sur le développement (Matt est un super relecteur de règles!) et la traduction. En plus des jeux Scorpion et Randolph, il pourra aider à la localisation et à l’adaptation de jeux venant d’Europe et destinés au marché nord-américain (Randolph et Scorpion doivent conquérir les États-Unis pour Hachette – un détail!). Oui, amis éditeurs français, on ne peut pas parler à des Américains en utilisant des mètres, tout comme certains sujets vous paraissent anodins alors qu’ils sont très chauds aux États-Unis. Et il arrive fréquemment que vos traductions de règles vers l’anglais... sont... Comment dire? Faites par des Français ?
Soulignons enfin l’arrivée de Joëlle, qui sera responsable de notre marketing. Et oui! Pour la première fois depuis sa création, le Scorpion Masqué a un responsable pour cet important poste!! Bienvenue Joëlle!!
Ouf! Je crois que ça résume bien les choses!
Publications
Ne l’oublions pas, Scorpion Masqué demeure un éditeur de jeux de société. Cette année, avec tous les changements vécus , en pleine pandémie qui plus est, nous ne pouvions simplement pas garder le rythme des années précédentes, surtout que nous avions terminé l’année sur 2 sorties qui avaient demandé un travail colossal: Master Word et Zombie Teenz Évolution.
En 2021, nous avons donc publié 2 titres: 1 nouveauté et 1 réédition. Pour la première fois en 6 ans, je peux dire que ce ne fut pas “trop”.
1. Olé! Guacamolé
Découvert tout juste avant mon départ pour Essen 2019, ce petit jeu “tout bête”, mais au bout du compte très malin, a été un coup de cœur instantané. Comme jeu, OG s’explique littéralement en moins de 18 secondes. Ce qui lui donne un grand avantage, car il peut se vendre plus rapidement et à un très large public. La capacité d’être “compris” après une courte explication orale par un vendeur a joué pour beaucoup dans son succès . Car oui, nous avons d’abord fabriqué 16 000 unités du jeu, et tout s’est envolé très vite . Au Québec comme en Europe. Je me mords encore les doigts de ne pas avoir appuyé plus fort sur le bon de commande. Que voulez-vous? Bref, nous avons dépassé les 20 000 unités vendues alors que le jeu est sorti en juin en Europe (pas la meilleure période pour un lancement) et vers la fin septembre au Québec!
Nous avons longuement hésité sur le thème, le format de la boîte et l’apparence. J’ai déjà tergiversé longtemps dans le dossier que représente les jeux sans thème... Manu et moi avons opté pour un habillage et un thème un peu absurde... French Tacos, Artic Flamingo... Manu penchait d’abord pour une toute petite boîte, un bel objet, comme les jeux de la gamme Oink Games . Mais si ce design touche une corde bien précise des esthètes que nous sommes, je crois que ces boîtes attirent moins l’attention du grand public, à qui nous destinions OG. Carl a proposé une boîte en forme d’avocat. Une super idée pour distinguer le produit sur les tablettes, mais aussi pour faire parler tant les influenceurs que les boutiquiers. Un coût supplémentaire non négligeable à la fabrication. Cette différence, je l’impute au budget marketing et je pense que c’était la meilleure façon d’investir cet argent. Beau travail également de notre Sébastien sur la typo des lettres. Ça marche trop bien!
Sur le marché de l’exportation, la vie de OG sera plus difficile. Tout d’abord, les petits jeux d’ambiance comme celui-ci ne bénéficient que très rarement de buzz similaires sur les sites ludiques comme Boardgamegeek.com. La demande des joueurs italiens ou japonais lambda s’avère donc à peu près nulle, car ces derniers n’ont même pas connaissance de l’existence d’OG, par exemple. Créer la demande dans ces marchés “externes” (pour nous) devient essentiellement la responsabilité du distributeur, une tâche qui n’est pas sienne normalement. La stratégie commerciale ne repose donc que sur le “push”, sans le “pull”. De plus, chacun de ces marchés regorge de ce genre de petits jeux qui connaissent un énorme succès, sans que leur renommée traverse les frontières. Vous seriez surpris, lecteurs français, de constater à quel point certains jeux que vous pensez être des succès planétaires sont inconnus ailleurs et à l’inverse, combien certains titres se vendent dans des quantités astronomiques chez vos voisins alors que vous n’en avez jamais entendu parler. Et donc bien souvent, les distributeurs étrangers n’ont pas “besoin” de notre OG, car ils ont déjà des jeux correspondant au même créneau qui se vendent extrêmement bien.
Malgré ces considérations, le jeu sera traduit en anglais, en italien et en espagnol... Et nous savons déjà que l’italien bénéficiera d’une réimpression! Pas mal!
2. Réédition de Mot pour mot
De tous les jeux que nous avons publiés depuis l’arrivée de Manuel en 2015, Mot pour mot trône au top du palmarès de ceux qui ont accéléré notre calvitie... Très simplement parce que nous n’avions pas su trouver quoi mettre sur la boîte. De plus, le format de celle-ci et le coût du jeu ne convenaient pas parfaitement à l’expérience de jeu proposée. En 2017, avant l’explosion des coûts que nous connaissons, un jeu d’ambiance reposant sur le langage, aux règles simples et d’une durée de 20 minutes se vendait 20 euros. Nous le savions de nos distributeurs, notamment de l’Italie et de l’Allemagne, où la question du prix compte davantage que dans la francophonie. Bref, ces marchés trouvaient le jeu génial, mais il fallait proposer une boîte moins chère. Comme pour Qui paire gagne, duquel nous pensions nous inspirer pour poursuivre la gamme à 25 euros, nous avions le cul entre 2 chaises. Plus cher que la plupart de ses concurrents, mais sans offrir pour autant le wow et le tape-à-l’œil de titres à 30 euros. Genre mettre un lit en plastique dans un jeu composé de cartes. Petit sourire en coin à un de mes éditeurs préférés... ;)
Puisque nous avons récupéré de nombreux territoires pour la distribution, nous avons dégagé du temps pour que Sébastien, notre designer graphique, puisse illustrer son troisième jeu complet au Scorpion! Au passage, nous avons appliqué l’un des grands principes de design de Mark Rosewater, en charge du design créatif chez Magic depuis plus de 20 ans... “You don’t have to change much to change everything” (regardez ceci: https://youtu.be/QHHg99hwQGY). En changeant 5-6 micro-détails pour rendre les parties plus rapides et le jeu plus familial, pour annuler l’avantage du premier joueur et plein d’autres affaires extraordinaires, nous avons réussi à créer, selon moi, un produit parfait. Oh! bien sûr, l’économie à la caisse pour vous n’est pas celle que nous espérions, mais quand même, en 2022 , avec l’explosion du coût des matières premières et des frais de transport, diminuer le prix de 2 euros me semble un exploit digne de mention! J’ai hâte de voir où ça va nous mener. Avec cette réédition, nous avons constaté avec joie que Mot pour mot est non seulement l’un des jeux préférés de notre équipe, mais aussi l’un des vôtres. Nous avons déjà lancé une réimpression! :)
Faits marquants
Évidemment, passer de patron à employé représente pour moi le changement le plus important de l’année. Quoique... vous poserez la question à mes nouveaux employeurs, je fais encore ce que je veux. Je vois partiellement de l’autre côté du rideau, j’observe comment fonctionnent certaines grandes entreprises, chacune demeurant différente l’une de l’autre bien sûr. Je vois la force d’un groupe... et aussi ce que je nommerai des incohérences. Un exemple? Pourquoi nous demander de produire des prévisions de ventes, pour ensuite les réviser et les augmenter?! Tsé. Si vous saviez mieux que nous combien d’unités de tel jeu nous vendrions, pourquoi nous avoir demandé de faire le calcul? J’ai bien hâte de voir, l’an prochain, qui avait raison. ;)
En même temps, nous avons accès à de nouvelles ressources, à un “pool” de penseurs, de créatrices et d’aides extraordinaires. Nous nous relançons, nous obtenons quantité d’informations utiles. Hachette a pour nous un visage des plus humains, chez Isabelle et Ghislaine qui, malgré les échelons d’une grande entreprise de même que l’océan et le décalage qui nous séparent, répondent dans la journée à toutes mes remarques... alors que Scorpion Masqué n’est qu’un des nombreux studios qu’elles doivent chapeauter.
Je ne jouerai pas le jeu du “tout va pour le mieux au royaume des Calinours” (oui, ces charmants oursons ont pris ce nom au Québec, voyez pourquoi, c’est savoureux: https://fr.wikipedia.org/wiki/Bisounours). La fusion avec Randolph ne s’est pas faite sans un certain nombre de désaccords. Et c’est très bien ainsi. Je veux dire que l’affrontement ne sera jamais une fin en soi, mais si on sait respecter la personne devant nous, il peut s’avérer très profitable. Vous devriez nous voir, Manuel et moi, nous obstiner au sujet d’une illustration ou du détail d’une règle. Il y a parfois des flammèches! Et avec le temps, Manu est devenu l’un de mes meilleurs amis. Nous sommes un binôme dont chaque membre a un immense respect pour l’autre. Ça ne s’est pas fait du jour au lendemain. Nous n'avons pas acquis cette confiance mutuelle instantanément. C’est plutôt le produit de nombreuses conversations, de multiples discussions, du fait que nous avons trouvé non pas des compromis, mais de nouvelles idées, qui dépassaient nos positions initiales respectives. Je vois aujourd’hui, de la même façon, des mouvements similaires dans les plaques tectoniques de Randolph et du Scorpion Masqué, et je pense que le résultat sera des plus intéressants. Tant dans les moyens que nous nous donnons pour réaliser des jeux que dans la structure plus humaine.
Une présence à Berlin
J’ai déjà pondu un petit photo-reportage sur ma présence à Berlin, à la cérémonie du Spiel des Jahres. Je n’insisterai pas trop sur cet événement aujourd’hui. Mais quand même. Deux nominations au Spiel. Au moment d’écrire ces lignes, je me pince encore pour y croire. Ce n’est pas une blague. Encore bravo aux auteurs Antoine, Corentin et Annick, aux illustrateurs NIKAO et Rémy Tornior de même qu’à toute l’équipe du Scorpion.
Chanson de l’année
Simon de la boutique Le Passe-Temps à Toulouse qui “capote sa vie”, comme dirait fiston, devant le nombre de sorties. C’est merveilleux. Je ne peux que nous féliciter de maintenir un nombre restreint de sorties...
TROP DE JEUX S'T'ANNÉE ! ( Feat Collectif FANFARNAÜM )
Vidéo de l’année
(cette section se veut, comme le reste, humoristique)
Eric Martin de Boardgamegeek est... un geek. Comme moi. Et vous, peut-être. Malgré toutes nos qualités de geeks, nous avons parfois de petites obsessions... presque malsaines? Notamment en ce qui a trait à la façon de ranger nos jeux après chaque partie. En début d’année, Eric avait “enflammé” Twitter en publiant une vidéo dans laquelle on le voit ranger un jeu d’un seul geste en envoyant pêle-mêle toutes les pièces dans le fond de la boîte.
Cet acte de “haute trahison” lui a valu un nombre incroyable de critiques et de remarques, déplacées, pour certaines, et farfelues, à mon avis. Il a répondu à ces critiques dans une longue réponse vidéo de 30 minutes (!!!!) que vous pouvez voir ici: The Smart Gamer's Guide to Putting Away Board Games
Ça n’a fait qu’empirer les choses... Il a donc répondu aux réponses de sa réponse dans une AUTRE vidéo de 37 minutes!!!!!! Feedback on The Smart Gamer's Guide to Putting Away Games
Chers amis geeks, il faut pouvoir rire de soi...
Article de l’année
C’est encore Eric Martin qui l’emporte cette année, avec cette analyse qui reprend et améliore ce que j’avais déjà formulé de façon bien moins complète et étoffée que lui, à savoir qu’il y a un biais en faveur des jeux plus récents sur les sites ludiques. Mais peut-être pas pour les raisons qui vous viennent à l’esprit... Simplement parce qu’il y a plus de jeux. Et qu’un grand nombre de joueurs connaît maintenant mieux ses goûts et s’aventure plus rarement en dehors du ou des genres qu’il aime, car il est déjà dépassé par tous les titres publiés dans ces genres. Et par conséquent, on joue moins aux jeux qui ne sont pas notre tasse et... on ne les note pas!
https://boardgamegeek.com/blogpost/124590/choice-and-bias-why-new-games-top-bgg-rankings?fbclid=IwAR1NW2LYo9IpH2vwsBPs2hHK1Gw6O3LKYgI7koF7EgwyqsEVSUVJ_UzTp00
Et pour l’anecdote, ça m’énerve quand on porte aux nues un titre récent qui n’est qu’une très pâle et mauvaise imitation d’un titre sorti quelques années plus tôt. Pour chaque bière que vous me payez, je vous donne des exemples (en privé!) lorsque nous pourrons nous croiser dans les festivals!
Jeux de l’année
Comme le Scorpion Masqué n’a pas le monopole des bons jeux, loin de là, voici quelques titres découverts dans l’année qui m’ont marqué.
Riftforce
J’ai l’impression que Riftforce n’a pas reçu l’attention qu’il méritait lors de sa sortie en français chez La Boîte de Jeu. Pourtant, il a pu se tailler une place sur la liste des recommandations du Kennerspiel des Jahres! Riftforce est un jeu d’affrontement pour deux joueurs où vous déploierez des troupes dans 5 corridors de combat. Le système d’activation est d’une élégance à faire pâlir les plus talentueux auteurs: vous jetez une carte de votre main et vous activez 3 unités ayant la même valeur OU provenant du même clan. Oui, il y a 10 clans dans la boîte, vous en drafterez 4 pour la partie. Vous marquez des points en éliminant les troupes adverses et pour chaque corridor où vous n’avez pas d’opposition durant le tour que vous sacrifiez dans le but de reprendre des cartes en main. J’éprouve toujours un immense plaisir à y jouer, à le faire connaître . Chaque fois, on doit découvrir de nouvelles combinaisons tout en s’adaptant aux cartes en main. Les parties sont tendues et les victoires, satisfaisantes. Si ça vous parle, foncez.
Beyond the Sun
Je dois vous avouer n’avoir joué que 2 parties de Beyond the Sun, mais j’ai très très envie d’en refaire d’autres. C’est mon “gros jeu” de l’année. Celui qui prend 15-20 bonnes minutes à expliquer, 90 minutes à jouer. Si la plupart des mécanismes ne révolutionnent rien, ça n’empêche pas Beyond the Sun d’avoir sa propre personnalité. C’est surtout un jeu de développement, un genre que j’adore depuis toujours.
Vous voilà donc dans une conquête spatiale, cousine des jeux de majorité, où vous choisirez vous-même quelles actions (de plus en plus puissantes) s’ajouteront sur le plateau, en accord avec la stratégie que vous aurez adoptée. À votre tour, vous déplacez votre seul ouvrier (plutôt que de le poser) sur un immense plateau. Ces actions permettront de gagner en efficacité dans votre course à la technologie de même que de déplacer vos vaisseaux sur un autre (tout petit) plateau représentant les planètes à coloniser.
Beyond the Sun, que plusieurs ont rebaptisé “Tech Tree: the boardgame”, pose quelques petits problèmes de lisibilité: trop de texte sur les actions qui s’ajoutent durant la partie. J’aurais apprécié plus d’icônes! Malgré cela, il fonctionne drôlement bien, surtout à 4 joueurs. Vous ferez rager vos adversaires, qui vous le rendront bien, sans pourtant avoir recours à des attaques directes. Le “timing” joue un rôle crucial! Comme vous récoltez automatiquement des ressources chaque tour (contrairement aux classiques allemands), vous ne serez pas trop limités dans vos actions, ce qui donne au jeu un petit côté “feel good” facile à apprécier.
Welcome to the Moon
Oh! Que c’est bien! Je doute que Welcome soit le jeu à cocher le plus “addictif”, mais il n’en demeure pas moins l’un des plus solides, des plus intelligents et des plus accessibles. On sent que cette nouvelle mouture profite de l’expérience acquise des autres versions lancées depuis 2018. Welcome to the Moon vous propose pas moins de 8 scénarios, 8 jeux différents serait-on tenté d’affirmer! Huit styles faisant preuve à la fois d’unité et de renouvellement surprenant. Certains demandent plus de planification, alors que d’autres permettent d’attaquer ou vous forcent à jouer littéralement coude à coude. Une campagne que l’on peut boucler rapidement et refaire (un peu) différemment chaque fois, grâce à un livret “dont vous êtes le héros”. Oui! Pas de blague! Je suis ébahi devant une telle générosité de la part des auteurs et de l’éditeur! Bravo à eux!
My City
Reprenant le concept des formes variées qu’il faut emboîter dans un espace restreint, à la Patchwork ou Tetris, selon votre âge, Reiner Knizia a su créer une petite merveille. My City est un jeu évolutif et compétitif (un grand défi de game design ) qui se joue en 24 parties d’environ 20 minutes. Le vainqueur de chaque partie avance sur une échelle “de progrès” et la personne qui aura le plus avancé sera couronnée grande gagnante à la fin. Au cours des premières parties, vous marquerez des points principalement en recouvrant le plus de surface possible, ce qui s’avère déjà un petit casse-tête sympathique. Puis, au fil des parties, de nouvelles contraintes et de nouvelles sources de points de victoire s’ajouteront. Knizia réussit un tour de force, car il sait ajouter exactement la bonne quantité de “nouveauté” à chaque partie pour renouveler l’intérêt, sans toutefois nous noyer. Son génie ne s’arrête pas là. Sans trop “divulgâcher”, disons qu’il retire parfois certains éléments, de sorte qu’à tout moment de cette histoire, la “somme” de règles à connaître reste parfaitement digeste. Et enfin, cerise sur le gâteau sur la cerise du sundae, il intègre même de nouvelles façons d’avancer sur l’échelle de progrès (celle qui vous mène à la victoire ultime à la fin des 24 épisodes) à l’intérieur des parties. Vous devrez donc naviguer entre les points de la partie en cours et l’échelle de progrès. Oh! Est-ce que j’ai dit que le système “de handicap ” pour aider les joueurs à la traîne est aux petits oignons? C’est juste délicieux.
Mindbug
On pourrait rapidement résumer Mindbug à ceci: un micro Magic. Pour ma part, je préfère “Mon premier Magic”, mais Manuel trouve que ça envoie sur une fausse piste: ça donne l’impression que Mindbug s’adresse d’abord aux enfants, alors que ce n’est pas du tout le cas. Mindbug est un jeu d’affrontement où l’on attaque l’adversaire avec des créatures que l’on met en jeu, chacune ayant son petit pouvoir qui brise les règles. Ces dernières s’expliquent en moins de 3 minutes, les parties se terminent en 10 minutes. Et on les enchaîne avec un plaisir fou. La boîte vient avec une cinquantaine de cartes, 32 différentes . Chaque joueur en reçoit 10 au hasard, en tire 5 pour sa main de départ. Et voilà le “deck” avec lequel vous devrez vous débrouiller pour toute la partie! C’est génial, violent, tendu, ingénieux. Malgré l’incroyable simplicité des règles (à votre tour, vous jouez une créature OU attaquez avec une seule de celles en jeu), il y a une vraie courbe d’apprentissage. Le jeu ne cesse de révéler une profondeur qu’on ne soupçonnait pas au début. J’attendais ce jeu depuis de nombreuses années.
Des chiffres?!
Je le sais bien, vous n’êtes ici que pour les détails financiers croustillants. C’est pourquoi je les place à la fin. J’espère que vous avez pris le temps de lire le reste de l’article. Voici donc quelques anecdotes avec des nombres...
Je n’ai pas le chiffre d’affaires (CA) exact de 2021, mais nous l’estimons à 4 millions de dollars canadiens (4 000 000$!), soit environ 2 800 000€. C’est une augmentation de près de 15%, un résultat extrêmement satisfaisant, compte tenu du fait que l’année dernière avait vu notre CA bondir de 36% par rapport à l’année précédente... D’autant plus surprenant que nous n’avions qu’une seule sortie originale en 2021, OG, dont l’infime prix unitaire n’aide pas du tout à gonfler un chiffre d’affaires. À l’opposé, l’an dernier, nous avons terminé l’année avec 2 titres qui ont fait des implantations monstrueuses: Master Word et Zombie Teenz. Il faut vendre 2 fois plus de OG que de Zombie Teenz pour générer la même somme! C’est à nos ventes à l’international, en dehors de la francophonie, que nous devons cette nouvelle croissance. Notamment à une commande de 50 000 unités de Zombie Teenz par l’Allemagne (venant avec une pub télé!!), avant même la nomination au Spiel des Jahres!
Ce chiffre de 4 millions de dollars canadiens a été calculé avec notre ancienne méthode et ne représente pas la donnée inscrite dans les livres officiels. D’ailleurs, c’est probablement et malheureusement la dernière année où je pourrai vous donner un CA précis et qui témoigne de notre croissance. Non, ce n’est pas parce que les dirigeants d’une “méchante entreprise” nous l’interdisent, mais bien parce que la façon de compter le CA à l’intérieur du groupe n’a rien à voir avec notre façon de faire. Très humblement, je calculais le CA en additionnant toutes les factures produites entre le 1er janvier et le 31 décembre. Point. Des comptables, sourire aux lèvres, m’ont fait comprendre que j’étais bien mignon, mais que les “vrais” ne font pas ainsi. Maintenant, certaines ventes et certaines dépenses seront déplacées sur l’année précédente ou reportées sur l’année suivante. Puis je ne sais quoi encore... Bref, un infernal fouillis qui alourdit la tâche de notre équipe comptable et ne change pas du tout le nombre de jeux que nous vendons au cours de l’année.
L’année 2021 a présenté son lot de défis: une fusion, un déménagement, deux changements de distributeurs sur nos deux plus gros marchés, une crise du transport et une réorganisation presque complète de l’équipe. Tout ça dans un monde en pleine pandémie, où la valse des confinements nous force à revoir constamment notre calendrier. Nous avons profité de 2021 pour prendre un peu d’avance, ou rattraper notre retard.
J’hésite encore entre les deux.
Effectivement, un nouveau jeu navigue déjà vers nos entrepôts et nous avons bien avancé le travail sur les fichiers de nos 2 autres sorties de l’année... en plus d’un autre titre prévu en 2023! Enfin, je commence déjà à planifier des titres pour 2024... Toute ce travail en amont, cette avance que nous avons prise par rapport à nos anciennes habitudes, ne fait que compenser les nouveaux délais de transport et le temps que prend la traduction des jeux avant leur lancement – nous aimons bien quand plusieurs langues font partie du premier tirage. Comme je le dis souvent, il faut s’améliorer chaque année si l’on veut se maintenir.
Bref, Scorpion Masqué se trouve aujourd’hui dans une excellente position. Oui, j’ai littéralement copié la phrase que j’avais écrite l’an dernier. En 2011, lors d’un concours en entrepreneuriat où j’étais finaliste, les juges m’avaient mentionné que la plus grande vulnérabilité de la compagnie était le fait qu’elle reposait sur les épaules d’une seule personne. Aujourd’hui, je peux compter non seulement sur une équipe des plus solides (oui, ça aussi, je le disais l’an dernier), mais également sur un groupe complet. Notre calendrier de sorties se compose d’un savant mélange de jeux totalement originaux et d’autres qui étendent les univers et les gammes que nous développons.
Sorties de 2022
Et donc, juste pour vous, en grande primeur [roulement de tambours…], notre première création originale de 2022 sera… Zéro à 100! Notre premier jeu avec la vedette montante Antonin Boccara. Zéro à 100, le jeu de connaissances pour ceux qui n’en ont pas! Le genre de jeu d’approximation où vous ne pouvez pas savoir, sans pour autant être dans le brouillard total... Un jeu par équipe qui générera des discussions des plus cocasses et surtout des surprises très surprenantes! Votre jeu d’apéro pour discuter de faits cocasses à la fois totalement inutiles et fascinants .
Suivra Turing Machine, le jeu de déduction le plus intelligent du monde, de Yoann Levet et Fabien Gridel.
Et enfin un jeu dans l’univers de Zombie Kidz, créé par Baptiste Derrez et Marc-Antoine Doyon. Oui, le gars du Passe-temps et le gars d’Es-tu game!
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Christian
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